Quand le Solitaire a-t-il été inventé : Origines, évolutions et variantes

Solitaire est l’un des jeux de cartes en solo les plus populaires, dont l’histoire remonte à plusieurs siècles. Bien que ses origines ne soient pas précisément connues, la plupart s’accordent à dire que ses racines sont européennes, notamment allemandes ou scandinaves, avec des liens possibles à la cartomancie.

Le jeu est connu sous de nombreux noms, dont Patience, Klondike, Cabale, et même Réussite en français, ce qui montre à quel point il s’est répandu et a évolué depuis les sociétés cultivées du XVIIIe siècle jusqu’à devenir un jeu en ligne largement joué avec des centaines de variantes captivantes. Comme le jeu apparaissait fréquemment dans les publications et la culture populaire au fil des siècles, on peut observer comment le Solitaire a évolué et influencé la société au fil du temps.

Descendant de ses origines exclusives et aristocratiques à une disponibilité instantanée sur tout appareil portable à travers le monde aujourd’hui, le jeu de Solitaire offre aux joueurs de tous niveaux divers moyens de tester leur habileté, leur stratégie et leur détermination.

XVIIIe siècle : L’histoire du Solitaire commence dans l’aristocratie mystique

L’origine ou l’inventeur du Solitaire reste inconnu, mais des descriptions du jeu sont apparues dans des textes à la fin du XVIIIe siècle en Europe, principalement parmi la classe aristocratique, et beaucoup pensent que le jeu était lié à la cartomancie.

Le Solitaire était suffisamment connu au XVIIIe siècle pour être inclus dans des publications qui décrivaient divers jeux ou se concentraient uniquement sur les jeux de cartes. Les jeux de Solitaire n’étaient pas seulement mentionnés dans ces volumes, certains textes décrivaient même différentes versions du jeu ou des dispositions de tableau variées.

Un texte allemand, Das neue Königliche L'Hombre-Spiel, publié en 1791, était une anthologie de jeux qui appelait le jeu à la fois Patience et Cabale. L’almanach des jeux, Das neue Spielalmanach für, une autre publication allemande publiée en 1798, décrit également le jeu, mais cette fois comme étant joué entre deux joueurs avec des spectateurs pariant sur le résultat.

La cartomancie (pratique de divination utilisant des cartes) a connu une forte montée pendant la Révolution française de la fin du XVIIIe siècle et dans la période post-révolutionnaire au début du XIXe siècle. Certains théorisent donc que le Solitaire trouve son origine dans la divination, car les dispositions en cartomancie, tout comme les dispositions de tableau dans les premières variantes du Solitaire, coïncident avec les descriptions du jeu dans les publications.

Quelle que soit l’origine du Solitaire, le jeu était bien connu sous son nom français, Patience, à la fin du XVIIIe siècle, car le français était la langue à la mode dans la classe éduquée. En fait, des meubles dédiés au jeu ont même été fabriqués durant la période géorgienne. Les tables de Patience servaient à la fois de décoration élégante et de table pliante pour jouer aux cartes.

XIXe siècle : Le Solitaire atteint de nouveaux joueurs et classes sociales

Qu’il soit utilisé pour se divertir, parier ou pratiquer la divination, le Solitaire a poursuivi sa popularité au XIXe siècle, atteignant de nouvelles classes sociales à travers diverses régions. À cette époque, les publications ont commencé à enregistrer les règles du jeu, et non plus seulement à en décrire le fonctionnement, de la Russie et des pays baltes à l’Angleterre et aux États-Unis.

Au début du siècle, le premier livre consacré uniquement au jeu a été publié à Moscou (1826), et six ont été publiés en Suède avant 1850. La première mention américaine du jeu apparaît dans une collection publiée en 1870, et la plus ancienne mention anglaise se trouve dans Illustrated Games of Patience de Lady Adelaide Cadogan (publié en 1874). Ce texte est important car il ne s’agit pas simplement d’une anthologie de jeux, mais d’un ouvrage entièrement dédié au Solitaire.

De nombreuses femmes ont écrit des livres incluant le jeu — souvent exclusivement consacrés à Patience — au XIXe siècle, ce qui montre que le jeu était non seulement populaire parmi les femmes, mais également considéré comme une activité de loisir appropriée. Games of Patience for One or More Players par Mary Whitmore (publié en 1887), proposait des variantes du jeu pour un ou plusieurs joueurs.

Le livre de Mrs. E.D. Cheney, Patience (publié en 1875), fait non seulement le lien entre le jeu et l’Allemagne et la Suède, mais commence par expliquer que le jeu possède de nombreuses variantes et qu’il constitue une bonne distraction après les corvées ménagères. Il fait même référence à l’utilisation du jeu comme outil de divination : on détermine l’issue d’un événement futur selon qu’on gagne ou non la partie. Amusements for Invalids d’Annie B. Henshaw (publié en 1870) souligne quant à lui l’utilité du jeu pour passer le temps.

Avec autant d’ouvrages écrits exclusivement sur un seul jeu de cartes, les variantes du Solitaire étaient clairement nombreuses à cette époque, utilisant un ou deux jeux de cartes standards avec des dispositions de tableau très variées.

Grâce à la Révolution industrielle, davantage de personnes issues des classes inférieures ont eu le temps libre nécessaire pour jouer. Même les romans des auteurs célèbres de ce siècle montrent que le jeu était apprécié aussi bien par l’aristocratie que par les classes populaires.

Par exemple, dans le roman Guerre et Paix de Léon Tolstoï publié en 1867, la vieille comtesse joue à Patience en attendant le retour de son mari et de son fils. Mais dans Les Grandes Espérances de Charles Dickens (1861), c’est le criminel Magwitch qui joue à Patience.

XXe siècle : Pause puis explosion du Solitaire

Bien que le Solitaire soit devenu un jeu en solo courant pour de nombreuses personnes au XIXe siècle, c’est son expansion numérique dans la seconde moitié du XXe siècle qui le propulsera comme nom incontournable dans les foyers.

Alors que le Solitaire a connu un âge d’or au XIXe siècle, la première moitié du XXe siècle a vu peu de mentions du jeu, quel que soit son nom, dans les publications ou la culture populaire. Hoyle’s Games mentionne la variante Klondike Solitaire (probablement nommée en lien avec la célèbre ruée vers l’or du Klondike de l’époque) dans son livre de règles de jeux en 1907, mais entre deux guerres mondiales et la Grande Dépression, les gens avaient probablement moins de temps libre pour s’adonner au jeu.

Au milieu du siècle, une nouvelle anthologie consacrée au jeu de Patience est publiée en 1950, suivie d’une autre plus approfondie en 1979. Ces livres explorent différentes variantes et les classent par type ou logique de jeu pour permettre aux lecteurs de trouver des jeux similaires à ceux qu’ils aiment.

Des westerns spaghetti mettant en scène des cow-boys jouant à différentes variantes du jeu jusqu’aux films d’action, on commence à voir le Solitaire apparaître sur grand écran dans la seconde moitié du siècle, preuve de son influence croissante dans la société.

Dans le film de James Bond de 1973, Vivre et laisser mourir, le personnage de Jane Seymour s’appelle Solitaire car elle exclurait les hommes de sa vie. Bien sûr, cela vient du personnage littéraire dans le roman d’Ian Fleming du même nom, publié en 1954. En 1975, le film Les Dents de la mer montre un personnage jouant au Solitaire sur le pont d’un bateau, soulignant que le jeu pouvait être joué n’importe où.

Aucune histoire du Solitaire ne serait complète sans mentionner son explosion en 1990 avec son inclusion dans le système d’exploitation Microsoft Windows 3.0. Le jeu informatique a été développé en 1988 par Wes Cherry, un stagiaire chez Microsoft à l’époque.

Le but de ce jeu était d’aider les utilisateurs à se familiariser avec l’usage de la souris pour interagir avec les icônes, fenêtres et menus de l’ordinateur. Cependant, la version de Microsoft a atteint un public qui n’avait jamais joué auparavant, et sa popularité a explosé. Des variantes comme le jeu plus simple FreeCell et le plus difficile Spider Solitaire ont aussi gagné en popularité.

XXIe siècle : Le Solitaire devient iconique

Avec le Solitaire préinstallé sur la plupart des ordinateurs personnels et le passage aux plateformes mobiles au cours de ce siècle, le Solitaire est désormais à portée de main, même sans jeu de cartes physique.

Avec 98 % des Américains possédant un téléphone portable, le Solitaire est prêt à être joué sur plusieurs appareils dans chaque foyer, atteignant un public encore plus large et s’adaptant à plus de lieux que dans les années 1990. Les gens ne sont plus limités à y jouer depuis un ordinateur chez eux ou au travail. Ils peuvent y jouer en faisant la queue à l’épicerie, en assistant à un match de leurs enfants ou en attendant le début d’une réunion.

Bien que les jeux de cartes, y compris Patience, aient toujours été visibles dans la culture populaire au fil des siècles, la popularité actuelle du Solitaire en fait désormais une icône culturelle du XXIe siècle. Utilisé pour exprimer une gamme d’émotions aussi variée que le nombre de variantes disponibles, il peut évoquer l’ennui, la frustration, la détermination ou encore le contrôle.

La chanson “Tear” des Red Hot Chili Peppers (2002) mentionne le jeu dans son premier couplet : « I can see clearly now that this is not the place for playing Solitaire », soulignant que l’ennui n’a pas sa place dans une vie pleinement vécue.

Dans la série The Office, on voit souvent les acteurs jouer au Solitaire. Ils avaient beaucoup de temps libre, alors ils payaient des factures ou jouaient au Solitaire entre les prises, renforçant l’idée que l’on se tourne vers ce jeu classique lorsqu’on est bloqué au travail ou qu’on cherche à tuer le temps. Ocean’s 13 illustre cette idée avec un employé de l’hôtel jouant au Solitaire au lieu d’aider un client à changer de chambre.

Dans The Lego Movie (2014), on voit un robot jouer au Solitaire pendant que le policier interroge Emmett, preuve que même les jeunes générations connaissent le jeu et qu’il peut être joué partout, même en prison. Gucci Mane a même nommé une chanson d’après le jeu en 2018, en rappant qu’il passait son temps en prison « sittin' in a cell playin' Solitaire », tandis que Taylor Swift mentionne le jeu dans sa chanson « Dear Reader » (2022) en chantant : « No one sees when you lose when you’re playing Solitaire », soulignant l’idée de solitude.

En 2019, le Solitaire a été intronisé au Video Game Hall of Fame pour sa popularité mondiale, son accessibilité, et son rôle clé dans l’introduction de millions de personnes à l’informatique personnelle via Microsoft Windows. Avec un lien indéniable à travers les siècles, le Solitaire offre une image visuelle et un symbole de la vie quotidienne, consolidant son statut de passe-temps accessible à tous les âges. Et avec l’évolution constante des plateformes IA et de la réalité augmentée, l’avenir des jeux de cartes promet de faire perdurer ce classique iconique dans les technologies émergentes.

L’esprit durable du Solitaire

Solidement enraciné dans des siècles de pratique, l’héritage du Solitaire n’est pas seulement historique, il est aussi profondément personnel. Les joueurs ont utilisé ce jeu tout au long de l’histoire pour équilibrer chance et logique, ou comme jeu apaisant pour stimuler l’esprit ou simplement passer le temps. Qu’il soit joué pour se divertir ou pour profiter des nombreux bienfaits cognitifs du Solitaire, ce jeu simple a défié les joueurs, depuis les aristocrates du XVIIIe siècle jusqu’aux natifs du numérique d’aujourd’hui.

De l’analyse informatique à l’utilisation de stratégies de Solitaire, les joueurs recherchent des moyens de profiter du jeu tout en atteignant leur meilleur score, et les nombreuses variantes offrent une large gamme de niveaux de difficulté. Même si vous pensez être expert du jeu classique, vous pouvez vous challenger avec des variantes de Solitaire plus difficiles. Et avec les avancées technologiques et l’évolution du jeu, encore plus de variantes et de défis sont assurés d’apparaître.

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